L’accès à la nationalité française par filiation: ALGERIE
Avant son indépendance, l’Algérie était un territoire français. Elle a été proclamée comme tel le
11 décembre 1848 par la constitution française de 1848. De ce fait, les musulmans et juifs
d'Algérie devenaient « sujets français » sous le régime de l’indigénat.
Le 14 juillet 1865, un sénatus-consulte a permis aux musulmans d'acquérir la citoyenneté française
en échappant à titre individuel au statut coranique au profit du droit civil français.
Le 24 octobre l870 le décret Crémieux a été adopté, permettant aux juifs d’Algérie de passer du
statut d’indigènes au statut de citoyens français. Ce statut a été accordé à tous les colons étrangers
de souches européennes. Les indigènes algériens restaient soumis au sénatus-consulte de juillet
1865 sur le statut des personnes.
Le 28 juin 1881, le code de l’indigénat a été adopté : il distinguait deux catégories de citoyens :
les citoyens français (de souche métropolitaine) et les sujets français, dont les algériens. Les sujets
français soumis au Code de l'indigénat étaient privés de la majeure partie de leur liberté et de leurs
droits politiques ; ils ne conservaient, au plan civil, que leur statut personnel, d'origine religieuse
ou coutumière.
Après la première guerre mondiale, plusieurs réformes, en faveur des algériens musulmans, ont
été adoptées sous la loi du 4 février 1919.
Cette loi a créé une nouvelle procédure d'accès à la pleine nationalité sous certaines conditions.
Outre la monogamie ou le célibat, la résidence de deux ans dans la même commune était exigée.
Le Procureur de la République ou le gouverneur pouvait aussi s'opposer à la demande pour cause
d'indignité.
Cette procédure a été étendue à la femme par la loi du 18 Août 1929.
Les effets de l’accession à l’indépendance de l’Algérie en matière de nationalité ont concerné
toutes les personnes nées avant le 1er janvier 1963. Ils sont régis par l’ordonnance du 21 juillet
1962 et par la loi du 20 décembre 1966.
Ces textes font l’objet des dispositions des articles 32-1 et 32-2 du Code Civil français
actuellement en vigueur.
Au sens de l’article 32-1 de ce code, ont conservé de plein droit la nationalité française les
Français musulmans relevant du statut civil de droit commun domiciliés en Algérie au 3 juillet
1962, date de l’annonce officielle des résultats du scrutin de l’autodétermination; il s’agit de ceux
qui ont renoncé de façon expresse à leur statut de droit local.
Cette renonciation ne pouvait résulter que d’un décret pris en application soit du Sénatus-consulte
du 14 juillet 1865 ou d’un jugement d’admission au statut de droit commun pris en application de
la loi du 4 février 1919 ou du 18 août 1929.
Les français musulmans de statut de droit local avaient la possibilité de souscrire la déclaration
récognitive de nationalité française afin de conserver la nationalité française même s’ils avaient au
3 juillet 1963 leur domicile en France métropolitaine.
Au jour d’aujourd’hui, seuls les ayants droits des admis à la qualité de citoyens français par décret
ou par jugement peuvent revendiquer la qualité de français par filiation.
En effet, l’article 20-1 du Code Civil dispose : « La filiation de l’enfant n’a d’effet, sur la
nationalité de celui-ci que si elle est établie durant sa minorité ».
Dans un arrêt du 8 juillet 2010, la première chambre civile de la Cour de Cassation a considéré
qu’un jugement supplétif rendu par les autorités judiciaires algériennes en 1993 qui constate qu’un
mariage ayant eu lieu en Algérie en 1920 apporte, en l’absence de contestation de sa régularité, la
preuve de l’antériorité de l’existence du mariage à la naissance d’une personne née en 1931,
partant sa filiation légitime, peut important que l’acte de mariage concernant ses parents n’ait été
transcrit qu’après sa majorité.
Une fois la filiation à l’égard de l’admis est établie, il reste au demandeur du certificat de
nationalité française de démonter qu’il a joui de façon constante de la possession d’état de
français.
Cette condition est requise par l’article 32-2 du Code Civil : « La nationalité française des
personnes de statut civil de droit commun, nées en Algérie avant le 22 juillet 1962, sera tenue
pour établie, dans les conditions de l’article 30-2, si ces personnes ont joui de façon constante de
la possession d’état de français ».
Pour la Cour de Cassation, la possession d’état de français est justifiée par la production de tous
documents émanant des autorités françaises justifiant la jouissance de façon constante de la
possession d'état de Français depuis dix ans tels que carte nationale d'identité, passeport français,
carte d'électeur, pièces militaires, immatriculation dans les consulats de France ainsi que, le cas
échéant, le jugement ou la décision administrative lui opposant son extranéité (Cour de Cass. 1ère
Civ. 11 juin 2005, pourvoi 03-11115).
Les algériens ayant un ascendant admis à la qualité de citoyen français en application soit du
Sénatus-consulte du 14 juillet 1865 ou d’un jugement d’admission au statut de droit commun pris
en application de la loi du 4 février 1919 ou du 18 août 1929, une fois les obstacles des articles
20-1 et 32-2 du Code Civil franchis, la possibilité de faire
valoir leur droit à la nationalité française par filiation.
Pour justifier de leur filiation à l’égard de l’admis, ils doivent
produire tous documents probants en application de l’article 47 du Code Civil Français retraçant
les chaînes des filiations légales au regard des règles du même code
Cependant, l’appréciation du caractère probant des actes produits relève du pouvoir souverain des
juges du fond.
Aussi, il n’est pas rare aujourd’hui de trouver qu’au sein d’une même famille et sur la base d’une
même filiation, certains se soient vus délivrer un certificat de nationalité française et d’autres ont
vu leurs demandes rejetées.